La dernière enquête Timms a révélé le niveau catastrophique des petits élèves français en mathématiques. On s’est alors demandé comment se déroulaient les maths dans d’autres pays. Amélie Di Fabio, professeure agrégée de mathématiques, responsable du groupe Maths Monde de l'IREM de Paris nous raconte ce qu’elle observe. Prêts pour un petit tour du monde ?
L’Angleterre :
Amélie Di Fabio est spécialiste de ce pays. Elle constate qu’on essaye de donner aux élèves une forme d’intuition mathématique et pas forcément de la rigueur jusqu’au début du lycée.
En 6ème, les élèves vont par exemple découvrir la notion de cercle. Au lieu de leur dire, « regardez la roue d’un vélo, c’est un cercle », ils vont expérimenter la notion autrement.
Le professeur demande aux enfants de venir avec une boite de conserve et une ficelle.
Puis ils vont chacun réaliser les manipulations suivantes :
- enrouler la ficelle autour de la boite de conserve
- mettre un repère au stylo, à l’endroit où la ficelle touche l’autre extrémité
- dérouler la ficelle
- prendre une règle et mesurer la longueur de la circonférence de la boite
- mesure la droite de part et d’autre de la boite de conserve (le diamètre)
Chaque élève vient ensuite au tableau remplir 3 colonnes :
Longueur de la ficelle (circonférence) / longueur de la droite (diamètre) / Division de la longueur de la ficelle par la droite (pi).
Cependant, à aucun moment les mots « mathématiques » ne sont prononcés.
A l’issue de cet exercice chaque élève s’aperçoit que les nombres trouvés dans la 3ème colonne sont proches les uns des autres, et proches d'une valeur qui est environ 3,14. Malgré les variétés de taille de boite de conserve, ils comprennent que le cercle est une figure qui a des propriétés intrinsèques quelque soit sa taille. Cela permet alors d’introduire le nombre pi.
C’est donc grâce à la manipulation que les élèves enclenchent une forme d’intuition mathématique. Ils auront tellement écrit 3,14, tellement vu 3,14, tellement entendu 3,14 que ce nombre, cette logique, va s’ancrer en eux.
Il est également intéressant de constater comment une partie des mathématiques, comme les fractions, fait partie de leur vie courante. Elles sont en effet présentes sur les panneaux routiers par exemple.
Quand les petits anglais doivent apprendre les fractions, c’est une notion tellement présente dans leur vie de tous les jours qu’ils n’ont pas la sensation de faire des mathématiques. Ils appréhendent donc cette notion sans a priori.
La Russie – La Roumanie
Ces deux pays ont quant à eux une approche très formelle des mathématiques. Dès le plus jeune âge, les élèves font des maths complexes. Ils sont habitués à participer à des concours et cela crée une énorme émulation. Entre les élèves d’une part et entre les écoles d’autre part. Certains tombent en amour devant les mathématiques grâce à cette approche concouriste. D’autres à l’inverse s’en détournent.
L’Italie
Le pays des pâtes est quant à lui à l’intersection de l’approche intuitive et de l’approche plus formelle. Mais il semblerait que plus les années passent, plus les professeurs s’orientent vers la manipulation et ce que l’on peut voir en Angleterre.
L’Allemagne
L’Allemagne est un pays fédéral, avec des « lander ». Les mathématiques sont donc enseignées différemment selon les lander. A Berlin, par exemple, l’approche des mathématiques est proche de l’Angleterre.
Quand les enfants travaillent sur les quadrilatères, on leur parle de « La maison des quadrilatères ». Une approche plus ludique pour leur faire comprendre la géométrie. Ainsi, à chaque étage, on retrouve des propriétés spécifiques à un quadrilatère. Au rez-de-chaussée, on trouve les quadrilatères quelconques, puis au fur et à mesure qu'on monte dans les étages, on trouve des quadrilatères particuliers avec de plus en plus de propriétés (sur le parallélisme des côtés, sur les diagonales...).
Autre approche intéressante : les problèmes. Que ce soit au CP ou plus tard, les élèves en France ont des énoncés. En Allemagne pas toujours ! Ils disposent d’un visuel, d’une affiche, d’une photo avec des chiffres, une promotion, l’annonce des soldes… Et c’est à eux de réaliser un calcul. Celui qu’ils souhaitent. Intéressant, non ? ;)
Les Etats-Unis
Ce pays est tellement grand qu’il n’est pas facile de parler d’une seule façon d’enseigner. Il y a des tentatives d'apporter une unité aux programmes d'enseignement à travers tout le pays, mais les disparités restent fortes entre états, et même entre écoles. Ce qu’il est intéressant de constater c’est qu’il est très courant outre-Atlantique de demander aux élèves des projets individuels ou par groupes pour clore un chapitre ou un thème : une affiche pour les murs de l'école, une saynète à jouer devant la classe, une vidéo humoristique, une chanson, une construction en 3D pour une expo de classe dans le hall de l'école, etc... Une façon bien sympathique de clore un chapitre de mathématiques !
Singapour
Impossible de faire l’impasse sur cet état qui a mis au point la fameuse « méthode Singapour » pour les mathématiques. Une pédagogie qui a agrégé le meilleur de toutes les autres : Montessori, Steiner, Freinet… Le but ? Passer par le triptyque manipulation/verbalisation/abstraction. Une méthode qui fait ses preuves, mais qui, si elle est mal comprise, peut rater son objectif.
Il est aussi intéressant de noter que d'autres facteurs peuvent expliquer leurs bons résultats en mathématiques, en particulier la formation des enseignants et la valorisation du métier dans la société.
Notons enfin que les enseignant·e·s français·e·s savent s'inspirer de tout ce qui se fait dans le monde pour l'adapter à leurs enseignements. Ils ont en effet la possibilité d'innover grâce à la liberté pédagogique qui est une spécificité française. C’est la raison pour laquelle certaines écoles nous appellent pour faire des cours de coding (mais pas que) dans leurs classes.
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